Arsy, 1864 – Viller-sous-Erquery, 1942
Séraphine Louis perd ses parents très jeune. D’abord fille de ferme, elle est ensuite placée comme domestique à Compiègne. À dix-huit ans, elle effectue les tâches ménagères dans un couvent de la congrégation de St Joseph de Cluny. Vingt ans plus tard, elle quitte l’établissement et se place comme femme de ménage chez des particuliers à Compiègne puis à Senlis.
Séraphine peint depuis son enfance ; mais c’est à quarante-deux ans qu’elle entend son « bon ange », tandis qu’elle prie à la cathédrale, lui demander de pratiquer plus sérieusement la peinture. Elle commence alors à s’exercer seule, sans maître, y passant tout son temps libre. C’est à Senlis, où elle est installée depuis 1904, qu’elle rencontre Wilhem Uhde, le critique d’art découvreur de Picasso et de Rousseau ; il s’enthousiasme dès le premier coup d’œil pour cette peinture si singulière.
Uhde offre sa protection à l’artiste et la soutient financièrement pendant de longues années. Les oeuvres de Séraphine participent grâce à lui à de nombreuses expositions ; mais en 1930, à cause de la Grande Dépression, Uhde doit cesser de l’aider. Totalement isolée du monde de l’art, Séraphine se sent abandonnée, et traverse deux années d’une terrible solitude. En proie depuis longtemps à des angoisses et un délire de persécution, son déséquilibre mental s’aggrave ; en 1932, elle est internée à l’hôpital psychiatrique de Clermont-de-l’Oise, où elle meurt en 1942, oubliée de tous, n’ayant plus jamais touché à un pinceau.
L’Œuvre de Séraphine est un miracle d’équilibre, d’harmonie et d’intensité. Son secret réside dans ses couleurs flamboyantes, aux reflets et à la texture uniques, dont personne ne connaît la recette puisque Séraphine a toujours refusé de révéler les ingrédients qu’elle mélange à son Ripolin. D’un tempérament mystique, elle travaille en alternant supplications angoissées et chants religieux exaltés, persuadée que son Œuvre révèle des intuitions spirituelles. Sa peinture se nourrit de son attachement viscéral à la nature, au cœur de laquelle elle puise son inspiration.
Le Bouquet de mimosas présente le style caractéristique de l’Œuvre de Séraphine : le vase est constitué de deux zones colorées, l’une au centre, l’autre à proximité des parois formées de traits au pinceau, vifs et courbes. Le fond rose est sommairement appliqué, tandis que se déploie un bouquet rigoureusement composé. Les contours des fleurs et des feuillages se chevauchent, s’effilochent. Le geste nerveux, délirant même quand il mêle la végétation aux parois et aux anses du vase, révèle sans peine la personnalité ardente, passionnée et exaltée de l’artiste.
Dans la peinture sur bois Branche de fruits, les couleurs s’embrasent : jaune audacieux du fond, orange des fruits, ocre et grenat du feuillage qu’atténuent à peine les verts pâles ou profonds des feuilles lancéolées. Les nervures sont dessinées à la hâte ; le profil découpé des feuilles est esquissé à coups de pinceaux fiévreux. Fruits et feuillages sont emportés dans le même mouvement, absolument inconciliable avec la conception traditionnelle des « natures mortes ».