Paris, 1962 –
Joël Lorand est un artiste autodidacte né en 1962. Il travaille de longues années comme ouvrier pâtissier, spécialisé dans la décoration des gâteaux. Passionné de bande dessinée et de dessin depuis toujours, ce n’est qu’en 1994, quelques mois avant la naissance de son fils, qu’il commence à pratiquer l’art. Dès lors, sa passion prend de plus en plus de place dans ses journées, jusqu’à devenir toute sa vie. Aujourd’hui, il vit et travaille à Alençon, dans l’Orne.
Au début, Joël Lorand travaille avec tout ce qui lui tombe sous la main : fusain, gouache, huile, crayons de couleurs, et parfois même ses anciens outils de pâtissier. Après avoir longtemps pratiqué le pastel et le crayon de couleur, il compose de plus en plus des œuvres à l’encre noire dans lesquelles le trait labyrinthique et complexe dessine des monstres (Freaks) bienveillants. Quant aux titres étranges qu’il donne à ses œuvres, l’artiste avoue ne pas vraiment savoir d’où ils lui viennent ; pour Freaks, il s’agit d’une référence au film du même nom, de Tod Browning, sorti en 1932, un véritable hymne à la cruauté humaine.
Il faut regarder longtemps les œuvres de Joël Lorand ; et même ainsi, de nouvelles dimensions apparaissent encore. Dans chaque réalisation, des créatures naissent, des visages se cachent un peu partout, eux-mêmes composés d’autres visages ; de multiples yeux clignent et dévisagent sans pudeur celui qui les regarde.
Il faut accepter de se perdre dans ces labyrinthes de végétation, qui emprisonnent en une superbe chorégraphie des petits êtres grimaçants aux cris silencieux. Chaque détour nous en fait rencontrer un nouveau : certains semblent effrayés, d’autres stupéfaits par ce qu’ils voient, d’autres encore se moquent doucement. Pourtant, aucun d’eux n’est menaçant : par leur absurdité, ils ne semblent vouloir que redire combien tout comme eux, nous sommes « étranges et étrangers à nous-mêmes » (Fred Noiret, catalogue de l’exposition de Lorand, espace Eqart, 2012). L’extrême précision des détails, sur lequel l’artiste passe beaucoup de temps, la finesse des traits et la symétrie de l’ensemble renforcent l’effet hypnotique. On ne sait alors plus ce que l’on regarde : un fascinant monde lunaire, ou le reflet de notre propre inconscient ?