Venarey-les-Laumes, 1883 – Paris, 1970
Camille Bombois est l’un des principaux “Primitifs Modernes” auprès de Rousseau, Séraphine, Bauchant, Vivin, Eve et Peyronnet.
Fils d’un batelier, il passe son enfance sur une péniche, et à douze ans, commence à travailler pour aider ses parents : il exerce divers métiers comme ceux d’ouvrier agricole, de cantonnier, puis de lutteur de foire dans des cirques ambulants. Arrivé à Paris en 1907, il devient terrassier sur le chantier du métropolitain, puis travaille comme typographe la nuit, ce qui lui permet de s’exercer la journée à la peinture, qu’il pratique depuis 1912.
Il expose tout d’abord ses tableaux à la Foire aux croûtes, sur les trottoirs de Montmartre. Puis, vers 1924, son œuvre est découverte par les collectionneurs et critiques d’art Wilhelm Uhde et Maximilien Gauthier, et obtient la reconnaissance qu’elle mérite. Dès lors, Bombois peut se consacrer pleinement à sa peinture.
L’artiste aime peindre la vie : ses tableaux portent souvent une touche d’humour, et peuvent représenter aussi bien des paysages paisibles que des femmes dans des positions érotiques. Marqué par son expérience dans le milieu circassien, il en représente également de nombreuses facettes, toujours avec une certaine joie et un certain dynamisme. Pour Camille Bombois, la peinture est un moyen de s’amuser et d’immortaliser les souvenirs de la vie peu commune qu’il a mené, avec, toujours, un souci du détail et de la couleur.
L’œuvre Le Moulin de Provins, révèle tout le talent et le sens de la composition de cet artiste autodidacte. Parfait coloriste, il propose un paysage aux couleurs subtiles, allant de l’ocre au vert. Les robes des femmes couvrent des corps ronds, qui contrastent avec la rigueur de la structure des bâtiments. Comme dans beaucoup de ses œuvres, l’eau, dont l’artiste raconte qu’elle fut la compagne de ses jeux d’enfants, occupe la place centrale, support de ses réminiscences. D’un coup de pinceau très doux, l’artiste peint ici ses deux amours : la nature et la femme.
Dans Rue de Faubourg, Camille Bombois reprend la même palette que pour ses tableaux de paysages naturels : il reste dans un camaïeu de vert et de bleu relevé de certaines touches ocres, couleurs qui semblent pourtant plus éloignées des éléments urbains d’un faubourg. Malgré tout, la composition est harmonieuse, les bâtiments anciens se dressent de part et d’autre de cette rue étroite et nous permettent d’appréhender l’espace tel que l’artiste a pu le connaître. Son point de vue étant légèrement en hauteur, il souhaite représenter l’espace dans son entièreté, du sol pavé jusqu’aux toits. La ruelle est profonde, et notre regard est attiré par la cour intérieure du bâtiment qui nous fait face, à droite, car celle-ci est baignée de lumière, et le personnage qui s’y trouve attise notre curiosité. En peignant cet espace de vie en détail, Camille Bombois nous donne à voir l’intimité de ses habitants, en autorisant notre œil à en appréhender les moindres recoins. Il se permet par ailleurs un trait d’humour avec les deux femmes à droite du tableau : l’une vient de se soulager dans la rue alors que la seconde, perchée à sa fenêtre, lui envoie un rouleau de papier toilette.
L’œuvre Massif de fleurs est une composition qui s’organise à partir du contraste entre deux couleurs complémentaires, le vert et le rouge. L’auteur joue ici avec les liens existant entre le monde sauvage et le monde humain : les verts suggèrent les mouvements de l’eau et la densité des feuillages, les roses et les rouges colorent les éléments introduits par la main de l’homme, comme le sable des allées, les fleurs des massifs, et les robes des femmes.
Bombois joue sur les mêmes contrastes de couleurs pour évoquer les berges de la Seine immortalisée par les Impressionnistes. “Le Fruit défendu”, auberge guinguette nichée dans la verdure offre une terrasse surplombant le fleuve. Son garde-corps est chargée de jardinières fleuries qui se reflètent dans les eaux vert sombre. L’asymétrie de la composition qui concentre les couleurs sur l’extrême gauche de la toile apporte toute son dynamisme à ce paysage, véritable havre de paix naturel.
Portrait d’Henri Bing-Bodmer : grand marchand de tableaux et découvreur de talents, il est l’un des premiers à remarquer et à défendre le talent et l’originalité des Naïfs, dès le début du 20e siècle. L’hommage que lui rend ici Camille Bombois – qui lui doit beaucoup – a un caractère solennel et respectueux : pose classique, application dans la description des détails. On est loin de l’érotisme et de la sensualité qui émanent de la plupart des tableaux de Camille Bombois. Seules deux notes de fantaisie et d’humour : des tableaux de l’artiste lui-même accrochés de part et d’autre du modèle.