Le Mans, 1914 – L’Arbresle, 1981
Lucien Le Guern fut atteint de surdité alors qu’il était jeune enfant, à la suite d’une méningite. Son père l’encouragea dès lors à exploiter son intérêt pour la peinture. Après avoir voyagé et participé plusieurs années au Salon d’Automne à Paris, il entra comme frère convers, en 1953, au sein de la province dominicaine de Lyon. Devenu Frère Louis-Gabriel, il s’installa en 1960 dans le couvent de La Tourette, construit par le Corbusier près de Lyon. Il se consacra alors davantage à sa peinture, et organisa même une exposition permanente intitulée « Musée de Dieu ». C’est surtout vers 65 ans qu’il fit de la peinture son activité essentielle.
A part quelques portraits, paysages et tableaux sur l’occupation allemande au Mans, la grande majorité des oeuvres de Lucien Le Guern est d’inspiration biblique. A la fin de sa vie, se sentant investi de la mission d’annoncer à ses frères la fin prochaine du monde, il s’attacha à illustrer les visions décrites dans l’Apocalypse selon Saint Jean, le dernier livre de la Bible, qui annonce le retour du Christ et le Jugement dernier. Ses oeuvres prirent alors des dimensions de plus en plus monumentales.
L’huile sur contreplaqué Le Christ Roi fait partie d’un ensemble de quatre oeuvres acquises par la Ville de Laval en 1984, qui illustrent chacune un épisode de l’Apocalypse. L’œuvre représente le retour en gloire du Christ, à la fin des temps, et sa victoire sur la Bête et ses alliés. La composition est volontairement complexe : personnages, plans et symboles se superposent, se bousculant confusément.
Le tableau est construit selon un plan axial, opposant systématiquement les forces du Bien et du Mal, les dynamiques de la chute et de l’élévation, les mondes terrestres et célestes. En bas à droite se trouve Saint Jean, qui a reçu les visions prophétiques et les a écrites dans son Apocalypse. A gauche, les flammes de la géhenne attirent la Bête, les armées des rois sont tombées à terre, Babylone est détruite ; à droite, dans un mouvement inverse, les chants des anges s’élèvent vers les cieux, où se trouve la Jérusalem céleste.
Dans La Résurrection des morts, Lucien Le Guern assimile, de la même façon, une iconographie traditionnelle avec une approche parfaitement naïve. Il s’agit d’une représentation de la Vision du Jugement des nations, issue de l’Apocalypse de Saint Jean (Ap. 20, 11-15) : « La mer rendit ses morts, la mort et l’Hadès rendirent leurs morts, et chacun fut jugé selon ses œuvres. Alors la mort et l’Hadès furent précipités dans l’étang de feu ». Les personnages sont représentés au milieu de restes humains, dans un décor sombre et apocalyptique, subissant la torture de la part de créatures maléfiques, incarnations du mal. Ils lèvent le regard vers des anges soufflant dans leurs trompettes annonciatrices du Jugement dernier.