François Monchâtre

Coulonges-sur-l’Autize, 1928

François Montchâtre entre dès l’âge de 17 ans à l’école des métiers d’art à Paris (section vitrail). A la suite de cette formation, il exerce divers petits métiers (marionnettiste, garçon d’ascenseur, étalagiste…). C’est surtout cette école de la vie qui lui aiguise un regard lucide sur la société, et que l’on retrouve dans ses oeuvres. En 1959 il décide de se consacrer pleinement à la peinture après plusieurs années de pratique. Ses compositions hautes en couleurs se revendiquent alors d’un Art Naïf teinté de Surréalisme.

A partir des années 70, l’artiste entreprend ce qu’il appelle sa « grande révolution » et abandonne la couleur au profit d’une peinture monochrome et du noir et blanc. C’est également à compter de cette période qu’il réalise ses premières sculptures baptisées OPNI (Objets Peints Non Identifiés).

Il élabore également une série de machines à rêver, en utilisant du bois, du plomb et des miroirs, singuliers dispositifs aux rouages poétiques et totalement inutiles, reflet des mécanismes qu’il admire depuis son enfance où il s’ingéniait à bricoler.

Monchâtre tire son inspiration aussi bien de son enfance que des différents métiers qu’il a pu exercer. Des expériences de sa vie d’adulte, il fait naître des oeuvres absurdes et grinçantes dans lesquelles il met en scène ses Crétins : des personnages stéréotypés, toujours de profil, aux membre raides, aux traits durs et anguleux, portant costume et cravate. Ainsi visualise-t-il l’homme moderne, que ce soit l’employé pressé et stressé, qui passe sa vie à obéir en oubliant de rêver, ou le « petit chef », insignifiant et tyrannique.

Dans son oeuvre, mais aussi dans sa vie, les livres ont toujours eu une place privilégiée. Les bibliothèques, temples de culture et de savoir et également lieux de flânerie de l’imaginaire où l’errance est recommandée, sont ses adresses pour s’adonner à la songerie.  Dans l’immense Bibliothèque HBN, les livres et les savoirs s’empilent quasiment à l’infini. L’artiste a pris soin d’écrire de nombreux noms d’écrivains, d’artistes ou d’historiens. Nombre de ces livres sont associés à l’univers des Naïfs (Bauchant, Vivin, Séraphine). Les livres sont rangés les uns à côtés des autres comme d’autres produits de consommation courante à l’instar des supermarchés. Ainsi la connaissance, l’intelligence même n’est plus qu’une marchandise. Toutefois, le respect de l’artiste envers le savoir est perceptible : les fondations du bâtiment sont réalisées à partir de l’ouvrage L’Encyclopédie.  Les visiteurs de la bibliothèque,  incarnés par des « Crétins » ne semblent pas émus par le poids de ce savoir et ne semblent pas intéressés par les livres portant sur des hommes célèbres ou écrits par de prestigieux auteurs. Attablés à leur table de lecture, ils ne sont passionnés que par des journaux, symboles de l’immédiateté et de l’information express alors que les livres eux sont le symbole d’un savoir long.

Veuillez répondre à toutes nos questions met ainsi en scène ces « crétins » imbus d’eux-mêmes. Ces figures incarnent l’employé moderne qui attend avec un large sourire forcé.Le personnage du milieu ne semble pas dans la même atmosphère de travail que ses collègues. La surcharge de travail semble avoir achevé ce « crétin » aux postures et attitudes mécaniques et répétitives. Au dos de chacun des personnages, sont représentés des symboles à connotation sociale, politique ou religieuse. Ainsi, on distingue les tables de la loi en référence à la justice, mais également un médaillon militaire, une pendule , ou encore une croix christique. Ces éléments viennent symboliser des valeurs incarnés par chacun des « Crétins » derrière leurs bureau.

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