Strasbourg, 1945 –
Les jeunes années de Marie-Rose Lortet sont marquées par les tricotages de sa mère et de sa grand-mère.
«Une de mes grands-mères m’enseignait le tricot, l’autre le canevas, une tante m’initiait à la technique des jours brodés, une autre au crochet.»
Pendant toute son enfance, Marie-Rose Lortet construit des objets avec des matériaux hétéroclites. Dans les années soixante, elle travaille dans un atelier de couture à Paris et réalise des couvertures «brodées» pour la presse et l’édition. À l’âge de vingt-deux ans, elle déménage en Normandie où elle demeure aujourd’hui encore. Elle y épouse Jacques Lortet, artiste sculpteur qui travaille la matière brute : buissons touffus, véritables entrelacs ligneux découpés à la scie sauteuse puis assemblés par de petits fils de métal. Ils exposent régulièrement ensemble, proposant un dialogue nourri entre leurs travaux.
Lorsqu’elle rencontre Jean Dubuffet à l’âge de 24 ans. Le maître perçoit d’emblée la force et l’originalité de son travail et décide de lui acheter quelques pièces.
En 1978, elle commence à construire des œuvres en trois dimensions, avec une technique de fils rigidifiés. Les premières œuvres de l’artiste privilégient la pureté du blanc. La polychromie apparaît ensuite dans des œuvres de grand format, plus abstraites.
Aujourd’hui, le travail de Marie-Rose Lortet bénéficie d’une véritable reconnaissance. Artiste prolifique, elle conte ses rêves « fantasques et méthodiques » au fil d’un peu plus de 600 œuvres, et présente ses créations dans de très nombreuses expositions.
Pour appréhender l’œuvre de cette artiste hors-les-normes, il est nécessaire de s’abandonner complètement à son imagination et de se laisser séduire par ces histoires savoureusement poétiques.
Par le choix des titres de ses créations, Marie-Rose Lortet offre, tout en subtilité, les clés de compréhension de ses travaux sans jamais rompre le rapport d’immédiateté, de spontanéité et d’émotion qui est à l’œuvre entre le visiteur et sa création. Au fil de ses œuvres uniques, elle conte un univers fantasmé et dépasse les conventions établies pour emmener le visiteur dans des territoires inattendus et des espaces inextricables.
Dans son travail, cette artiste d’exception explore, détourne, réinvente et transcende la technique du tricot créant une œuvre textile expressive et colorée. Quel que soit le fil dont ils sont faits, ses sujets – personnages espiègles, paysages imaginaires ou vêtements miniatures – nous entraînent dans un univers vif et symbolique. Loin des conventions, Marie-Rose Lortet tricote des histoires aux accents poétiques ou burlesques à partir de matériaux divers : textile, coton, laine, lin, soie, dentelle, lacets, ficelle, bolduc, ruban, fil de cuivre téléphonique, végétaux, résine, peinture acrylique, papiers de chocolat, feuilles de vigne, mantelets de champagne…
« Tout peut être tissé ! Peu importe le matériel, un nid d’oiseau, c’est la poésie magistrale du tissage et de la récupération ». Pour Marie-Rose Lortet, tout est le résultat d’un long procédé de fermentation créative où toute chose, à un moment ou à un autre, ressurgira, et sera utilisée. »
Paroles de parchemins est une oeuvre composée de papiers brillants enveloppant les chocolats de Noël et de feuilles de la vigne vierge qui grimpe le long de la façade de la maison de l’artiste. Ces papiers argentés, dorés ou rouges sont torsadés formant des lettres qui s’insèrent, s’entrelacent entre les feuilles végétales séchées, roulées et réunies par du fil blanc.
Ce que Marie-Rose Lortet aime dans le tricot, c’est la lenteur : la pensée et l’imagination ont le temps de se former, de voyager, de créer. Dans Masque à l’écoute !, le visage est composé des circonvolutions de laine et de tissus mêlés à une cosse végétale qui se lie parfaitement à l’ensemble pour créer la bouche du visage.