Le 19 juin 1889, le peintre d’origine lavalloise, Charles Landelle, épouse en secondes noces son ancienne locataire du quai Voltaire à Paris, Madame veuve Anaïs Beauvais, née Lejault (1832 – 1898). Celle-ci, artiste-peintre et musicienne, sera qualifiée par Casimir Stryienski, homme de lettres et neveu de Landelle, de « femme d’élite » ou de « femme en tout point supérieure ».
Elève de Carolus Duran et de Jean-Jacques Henner, qui restera d’ailleurs de ses intimes, Anaïs Beauvais débute au Salon des artistes français de 1868. Par la suite, elle expose régulièrement des scènes de genre et de nombreux portraits appréciés du public. Elle se plaît ainsi à peindre les artistes, écrivains et intellectuels dont elle s’entoure dans son salon du quai Voltaire ou dans sa propriété de Chennevières, sur les bords de la Marne. S’y retrouvent Léon Bonnat, Jean-Léon Gérôme, Jules Lemaître et sans doute Marcel Proust. Le portrait de Madame Proust peint par Anaïs Beauvais figure aujourd’hui dans les collections proustiennes du musée d’Illiers-Combray.
Darras, l’homme ici représenté, appartient au groupe de fidèles qu’Anaïs Beauvais recevait. Le modèle, de noir vêtu et coiffé d’une toque de fourrure, est plongé dans la lecture d’un ouvrage d’art. La scène respire la quiétude et dans le traitement pictural, tout en douceur, transparaissent le respect et la tendresse de l’artiste pour son ami.